Le GIEC prépare des rapports d'évaluation détaillés sur l'état des connaissances scientifiques, techniques et socio-économiques sur le changement climatique, ses impacts et les risques futurs, ainsi que sur les options permettant de réduire le rythme auquel le changement climatique se produit.
La 6ème édition du rapport du GIEC se décline en trois grandes parties:
Qu’est-ce que le rapport du Groupe 1 du GIEC ?
Introduction méthodologique
Résumé pour décideurs - Figures clés
Ensemble des chapitres
Conclusion
La contribution du groupe de travail 1 au sixième rapport d'évaluation est la compréhension physique la plus récente du système climatique et du changement climatique, rassemblant les dernières avancées de la science du climat et combinant de multiples sources de données provenant du paléoclimat, des observations, de la compréhension des processus et des simulations climatiques mondiales et régionales. (GIEC 2021)
Aussi, pour nos décideurs et nous même, comprendre les causes et les impacts du changement climatique est essentiel pour une réponse à la hauteur des enjeux. Les éléments scientifiques sur le climat sont aujourd'hui tellement nombreux que le travail du GIEC de synthèse et de confrontation des différentes études est nécessaire pour y voir clair.
Pour autant, ces rapports, particulièrement longs (plusieurs milliers de pages !) n’ont pas vocation à être lus par le grand public. C’est pourquoi il existe un résumé aux décideurs que nous conseillons de lire et de diffuser. La synthèse que nous vous proposons ici reprend les éléments du résumé aux décideurs mais va plus loin en déclinant le travail chapitre par chapitre et se veut comme un kit pratique pour retrouver les informations les plus utiles.
Notre travail se base notamment sur les synthèses des chapitres réalisés en août 2021 (disponibles ici) et complétées par d’autres analyses réalisées sur le sujet.
Sorti le 09/08/2021, le premier volet de l’AR6 (Assessment Report 6) contient 3949 pages pour sa version complète, 159 pour son résumé technique et 42 pour le résumé aux décideurs. Écrit par un total de 234 auteurs, il a reçu au travers de ses processus de relecture un total de 78 000 commentaires (75 000 de la communauté scientifique et 3 000 de gouvernements). À l’issue de cet énorme travail de synthèse, la version finale constitue un consensus de la compréhension actuelle des phénomènes physiques relatifs au changement climatique.
Un total d’environ 14 000 études scientifiques a été recensé, le GIEC n’en faisant que la compilation, confrontation et synthèse. Avec une quinzaine de sources présentées par page, cela donne une bibliographie d’un millier de pages (ou un quart de la taille totale du rapport).
Ces chiffres concernent seulement le volet 1 de l’AR6 (aussi appelé WG1, pour Working Group 1). Les ordres de grandeur sont similaires pour les 2ème et 3ème parties, sorties respectivement fin février et début avril 2022, traitant des mesures d’adaptation (WG2) et d’atténuation (WG3), et dont vous pouvez retrouver nos synthèses ici :
Les différents chiffres (nombre de pages, d’articles, de commentaires, etc) sont en hausse d’un rapport à l’autre, à l’image de la recherche et du contenu scientifique en général qui s’intensifie petit à petit sur ces sujets.
Ainsi, les dates de sorties des précédents rapports étaient 1990 (AR1), 1995 (AR2), 2001 (AR3), 2007 (AR4) et 2014 (AR5). La Fresque du Climat, atelier de vulgarisation désormais assez connu, a typiquement été construite sur l’AR5.
Lors de chaque cycle (pendant lequel l’Assessment Report est préparé), des rapports intermédiaires peuvent être préparés. Pour le 6e cycle, il y eut 3 rapport :
Ce 3ème, lancé à la suite de la COP21 en 2015 et paru en 2018, a probablement été le rapport récent du GIEC le plus important, avant donc la sortie en Août 2021 de l’AR6.WG1 dont nous allons parler ici plus en détails.
Avant d’aller plus loin, il faut rappeler un élément clé des travaux du GIEC. Les rapports ne sont ni une prédiction de l’avenir des sociétés humaines, ni une prescription de ce que les politiques doivent faire. Il s’agit de scénarios, présentant les impacts à plus ou moins long terme, selon les paramètres regardés et hypothèses posées. Quant à l’aspect politique, n’étant pas un organe décisionnaire, le GIEC se contente d’être le plus réaliste/pertinent possible. On dit en anglais qu’il est : policy relevant but not prescriptive.
Enfin, afin d’exprimer le degré de confiance selon les données présentées, le GIEC utilise la liste suivante de qualificatifs :
Le réchauffement de la surface de la Terre que nous connaissons actuellement est sans précédent depuis des milliers d’années. Le point clé de l’AR6 est que le rôle de l’Homme dans le changement climatique est désormais indéniable : la crise que nous connaissons actuellement n’est PAS due à la variabilité naturelle du climat.
Figure 1 - Évolution du réchauffement dans le temps (observation + modélisation) (a) et selon l’intégration ou non des activités humaines dans la modélisation (b) (SPM.1.a-b)
Figure 2 - Réchauffement observé depuis 1850-1900 (a), puis décomposé selon différentes approches (b & c) (SPM.2.a-b-c)
Figure 3 - Synthèse des changements observés et imputables au changement climatique (a, b & c) (SPM.3.a-b-c)
Le réchauffement climatique affecte déjà toutes les régions du monde. Les vagues de chaleur vont se multiplier et s’intensifier partout dans le monde. Les précipitations intenses et les sécheresses rendront certains territoires beaucoup plus vulnérables, contribuant à l’injustice climatique.
Figure 4 - Évolution des émissions de CO2 et autres GES selon les scénarios (a), avec leur contribution respective au réchauffement global (b) (SPM.4.a-b)
Figure 5 - Évolution des différents évènements extrêmes selon le degré de réchauffement (SPM.6)
Figure 6 - Relation entre les émissions cumulées de CO2 et le réchauffement moyen à la surface de la Terre (b) (SPM.10)
Chaque tonne de dioxyde de carbone compte ! C’est en raisonnant en émissions cumulées que l’on évalue l’ampleur du réchauffement climatique. Il y a une relation quasi linéaire entre les émissions de CO2 cumulées et le réchauffement global qu’elles provoquent (environ +0,45°C pour +1000 Gt). Nous avons donc un budget carbone (montant net de CO2 que les humains peuvent encore émettre à ne pas dépasser), particulièrement restreint pour limiter le réchauffement à +1.5°C.
En l'occurrence, un budget estimé à 300 Gt (d’émissions cumulées jusqu’à la fin du siècle, pour avoir 83% de chances de tenir les 1,5°C). Concrètement, cela signifie une diminution immédiate et radicale de nos émissions, suivie dans la plupart des scénarios d’une élimination nette du CO2 de l’atmosphère.
Le premier groupe (WGI) travaille sur les bases physiques du dérèglement climatique. Il n’y a pas de production de contenu mais évaluation et synthèse des connaissances scientifiques existantes.
Les rapports servent dans le cadre des négociations internationales (comme l’Accord de Paris) : ce rapport acte d’ailleurs que les engagements et les actes de chaque pays sont insuffisants pour parvenir à l’objectif de maintien de l’augmentation de la température moyenne mondiale en dessous de 2°C.
Ce rapport (AR6-WGI) permet donc de :
Depuis les années 70, le forçage radiatif net est positif et augmente à un rythme croissant, principalement à cause des GES (Gaz à Effet de Serre).
Le changement dû aux facteurs naturels (activité solaire, aérosols volcaniques) est négligeable par rapport aux facteurs anthropiques (voir chap. 3).
Figure 2 (vue en introduction) - Réchauffement observé depuis 1850-1900 (a), puis décomposé selon différentes approches (b & c) (SPM.2.a-b-c)
Les concentrations de GES dans l’atmosphère ont drastiquement augmenté entre 1750 et 2019 : +47% pour le dioxyde de carbone (CO2), +156% pour le méthane (CH4) et +23% pour le protoxyde d’azote (N2O).
Ces taux d’augmentation sont plus élevés qu’entre les périodes glaciaires et interglaciaires au cours des 800 000 dernières années. Les concentrations atmosphériques de CO2 n’ont quant à elles jamais été aussi élevées depuis au moins 2 millions d’années.
La hausse de température est ainsi actuellement de +1,1°C.
L’estimation du forçage radiatif (caractérisant l’intensité du réchauffement moyen et défini plus en détail dans la chap. 7) des 3 principaux GES (en 2019 par rapport à 1750) est de + 2,9 W.m-2.
Certains facteurs ont un forçage radiatif négatif (aérosols : -1,1 W.m-2, utilisation des terres : -0,15 W.m-2) mais tous les facteurs climatiques réunis conduisent à un forçage radiatif net positif (et donc à un réchauffement global).
La température moyenne mondiale à la surface de la Terre de ce dernier siècle est comparable aux températures de la dernière période interglaciaire (il y a 125 000 ans). Elle a augmenté de 1,09°C entre 1850–1900 et 2011–2020, à une vitesse jamais observée sur les 2000 dernières années. Cette augmentation a été plus rapide au niveau des terres (1,59°C) qu’au niveau des océans (0,88°C).
Les précipitations terrestres mondiales ont augmenté depuis 1950, plus rapidement depuis les années 80.
Depuis 1901, le niveau moyen mondial de la mer a augmenté de 0,20 m. Cette augmentation à été plus rapide au cours du 20e siècle qu'au cours de tout siècle précédent (au moins depuis 3 millénaires) et elle s'accélère encore. On observe également une acidification des océans, dont le pH baisse depuis plusieurs décennies.
De nombreuses espèces marines et terrestres se déplacent vers les pôles et vers de plus grandes profondeurs ou de plus hautes altitudes. Cependant, il y a un décalage des réponses entre les espèces (une minorité se déplaçant dans la direction opposée), qui implique que la composition en espèces des écosystèmes est en train de changer.
Point clé de ce 6ème rapport : il n’est plus possible de douter de l’influence humaine sur le réchauffement climatique.
Élément superbement illustré par ce graphique du SPM, que nous avons rapidement vu précédemment.
Figure 1 (vue en introduction) - Évolution du réchauffement dans le temps (observation + modélisation) (a) et selon l’intégration ou non des activités humaines dans la modélisation (b) (SPM.1.a-b)
L’homme est responsable d’une hausse des températures de 1,07°C entre les périodes 1850-1900 et 2010-2019 :
Dans tous les scénarios, l’augmentation de la température sur les prochaines années devrait atteindre au moins +1,5°C.
Figure 7 - Variation des températures moyennes selon les régions du monde, à +1°C (observé et simulé) (a), puis à +1,5°C, +2°C et +4°C (b) (SPM.5.a-b)
Figure 8 - Évolution du réchauffement à la surface, de 2015 à 2100, selon les 5 scénarios principaux de l’AR6 (SPM.8.a)
Les projections pour chacun des cinq scénarios sont indiquées en couleur. Les nuances représentent les fourchettes d'incertitude - de plus amples détails sont fournis pour chaque panneau ci-dessous. Les courbes noires courbes représentent les simulations historiques (panneaux a, b, c) ou les observations (panneau d). Les valeurs historiques sont incluses dans tous les graphiques afin de fournir un contexte pour les changements futurs projetés.
Figure 9 - Évolution, de 2015 à 2100, du réchauffement à la surface (a), de la surface gelée en Arctique en Septembre (b), du pH des océans (c), de la montée des eaux (d), puis à nouveau de la montée des eaux mais cette fois en 2300 (e) (SPM.8.a-b-c-d-e)
Le dépassement des +1,5°C se produirait au début des années 2030 (soit 10 ans plus tôt que prévu dans l'AR5 !).
L’augmentation de la température globale va entraîner une augmentation des précipitations sur les territoires émergés (jusqu’à +5% dans le SSP1 et +13% dans le SSP5), avec de fortes disparités régionales.
Figure 10 - Variation moyenne des précipitations annuelles, selon un monde à +1,5°C, +2°C ou +4°C (SPM.5.c)
Dans tous les scénarios, il est certain que le niveau des océans va augmenter sous l’effet de la fonte des glaces et de la dilatation de l’eau (et ce pendant des siècles, jusqu’à +15 à 20 m en 2300 dans l’estimation haute du dernier scénario !).
Dans tous les scénarios, la capacité des océans à absorber du CO2 diminuera, mais la quantité de CO2 augmentera, acidifiant les océans.
D’ici 2300, l’élévation de la température pourrait atteindre +1 à 2,2°C pour le SSP1-2.6 et +6,6 à 14,1°C pour le SSP5-8.5 : de telles températures seraient inédites depuis 15 à 20 millions d’années.
L’accumulation actuelle de GES est d’origine anthropique (cf. chap. 3). Sur 2010-2019, nos émissions de CO2 se sont réparties entre l’atmosphère (46%), les terres (31%) et l’océan (23%).
La concentration excessive de CO2 restant dans l’atmosphère est la cause principale de l’excès de chaleur absorbée. Celle-ci entraîne des rétroactions climatiques sur les terres et océans.
Figure 11 - Principaux composants, processus et voies qui régissent les concentrations historiques et futures de CO2, ainsi que les rétroactions carbone-climat dans le système terrestre couplé (FR.5.2)
Les émissions anthropiques de CO2, y compris le changement d'affectation des terres, sont réparties via des rétroactions négatives (flèches en pointillés turquoise) entre les océans (23 %), les terres (31 %) et la fraction aérienne (46 %).
Cela régule la majeure partie du forçage radiatif qui crée le déséquilibre thermique à l'origine des rétroactions climatiques sur l'océan (bleu) et la terre (vert).
Les rétroactions positives (flèches rouges) résultent de processus dans l'océan et sur la terre (texte rouge). Les rétroactions positives sont influencées simultanément par les rétroactions carbone-concentration et carbone-climat. D'autres processus de la biosphère ont été inclus, mais leur impact sur les rétroactions est encore incertain (flèches pointillées en bleu).
L'élimination du CO2 de l'atmosphère vers l'océan, la terre et les réservoirs géologiques, nécessaire pour des émissions négatives, a été incluse (flèches grises).
Bien que ce schéma soit construit autour du CO2, le GES dominant, certains des mêmes processus influencent également les flux de CH4 et de N2O et la force des rétroactions positives des systèmes terrestres et océaniques.
81% à 91% des émissions de CO2 sont dues à la combustion d’énergies fossiles. Le reste est attribué à l’usage anthropique des terres (déforestation, artificialisation…).
Malgré l’augmentation des émissions anthropiques de CO2, la part de ces émissions stockée dans l’atmosphère a été relativement constante sur 60 ans : les océans et la végétation terrestre ont capté toujours plus de CO2.
La capacité des océans à être un puit de carbone va cependant diminuer. Dans les cas de très fortes émissions de CO2 (ou d’émissions nettes négatives pour des raisons différentes), et à cause des équilibres entre les différentes concentrations, la terre et les océans se transformeront en sources (et non puits) de carbone au-delà de 2100.
L’acidification des océans (diminution du pH) s’accentue au fur et à mesure qu’ils captent une partie des émissions anthropiques de CO2, et cette acidification se diffuse jusque dans les profondeurs.
Figure 12 - Propagation de la surface d'acidification des océans vers l'intérieur de l'océan depuis l'époque préindustrielle, en vue depuis l’extérieur (a) et en coupe (b) (FR.5.21.a-b)
Enfin, de façon générale, plus nos émissions sont importantes, moins les puits peuvent absorber (en proportion de ce que nous avons émis). Les capacités des différents systèmes ne sont en effet pas infinies et arrivent progressivement à saturation passé un certain seuil.
Figure 13 - Évolution de la part d’émissions pouvant être absorbée par les océans et les terres, selon le scénario et degré d’émissions associé (SPM.7)
Les forceurs du climat à courte durée de vie (Short Lived Climate Forcers - SLCF) affectent le climat et sont, dans la plupart des cas, également des polluants de l’air. Parmi eux les aérosols (particules solides ou liquides en suspension) et les gaz dits chimiquement réactifs (méthane, ozone - de basse altitude, pas celui de la couche d’ozone, certains composés halogénés…).
Les aérosols ont un impact local sur le climat (souvent là où ils sont émis) contrairement aux gaz à effet de serre qui se répartissent dans l’atmosphère. De plus, l’impact de la plupart des SLCF dépend surtout des émissions à un instant t, et peu de leur accumulation dans l’atmosphère.
Figure 14 - Contribution au forçage radiatif (à gauche) et à l’évolution moyenne de la température de l’air en surface (GSAT : Global mean Surface Air Temperature - à droite) selon les différents GES (FR.6.12)
Les SLCF sont le plus souvent co-émis avec le CO2 lors de la combustion de pétrole, charbon, gaz, bois, etc…
Au cours de la dernière décennie, les observations montrent de fortes variations régionales dans les tendances de l’ozone, des aérosols et de leurs précurseurs.
Jusqu’à maintenant, les aérosols ont eu un effet globalement refroidissant : ils ont donc masqué partiellement le réchauffement induit par les GES.
Les SLCF refroidissants peuvent ponctuellement masquer de manière significative ou compenser complètement le réchauffement dû au CO2, mais leurs effets diminuent rapidement au cours des premières décennies qui suivent leur émission, vis à vis du CO2 à la durée de vie beaucoup plus longue.
Depuis le milieu des années 70, la baisse des concentrations d’aérosols a réduit leur effet refroidissant (mais cette diminution varie selon la région du monde).
Le dioxyde d’azote, l’ozone et les aérosols dégradent la végétation terrestre avec un impact sur le rendement agricole et le cycle du carbone (dégradation de la capacité à stocker le carbone). La qualité de l’air future va dépendre des émissions de polluants et de leurs précurseurs, mais aussi de l’ampleur du réchauffement climatique.
Au cours des 20 prochaines années, il est très probable que les modifications des émissions des SLCF entraîneront un réchauffement par rapport à 2019, mais aussi une diminution de la pollution atmosphérique mondiale.
Le réchauffement global induit par les modifications des SLCF serait plus élevé dans les scénarios où la qualité de l’air continue à se dégrader : en termes de politiques publiques, il faut réduire les émissions de SLCF, pour la qualité de l’air comme pour le climat.
Le budget (ou bilan) énergétique est la quantité d’énergie totale emmagasinée sur Terre, exprimée en ZJ (zettajoules). Si ce budget est équilibré, la température moyenne sur Terre reste relativement constante (sans changement global). S’il est déséquilibré, on assiste à un forçage radiatif qui mène à un changement des températures.
Ce forçage radiatif, exprimé en W.m-2 (puissance reçue par mètre carré) représente la différence entre la quantité d’énergie - ou plutôt la puissance - perçue par le système terrestre (venant du soleil) et celle qui en ressort (transformée en rayonnements infrarouges) : c’est donc une mesure de déséquilibre.
Le forçage radiatif effectif (ERF) anthropique total est égal à +2,72 W.m-2 sur la période industrielle (entre 1750 et 1920) :
Il est certain que ce sont les GES qui sont les principaux responsables du forçage radiatif observé aujourd’hui. Au total, on constate un forçage radiatif positif : l’énergie accumulée sur Terre produit un effet réchauffant
Budget énergétique de la Terre : on estime désormais à 435 ZJ (10^21 Joules) la quantité d’énergie accumulée par le système Terre entre 1971 et 2018. C'est comme si tous les ans (depuis 50 ans) le système emmagasinait 100 fois la production électrique annuelle mondiale actuelle. Et cette accumulation s’est accélérée ces dernières années !
Cet excès d’énergie qui s’accumule sur la Terre va ensuite :
Les nuages jouent un rôle essentiel dans la réponse du climat au forçage avec une rétroaction positive. Ce ne sont pas les seuls : l’effet combiné des rétroactions radiatives connues amplifie le réchauffement. Sur des échelles longues, un réchauffement supplémentaire proviendra donc des multiples facteurs touchés par le premier réchauffement : c’est l'effet d’emballement rétroactif.
Le réchauffement climatique et l'augmentation des températures entraînent :
Le réchauffement climatique renforce la sévérité des épisodes très secs ou très humides. De plus, des changements dans la circulation des flux atmosphériques modifient la localisation et la fréquence de ces extrêmes, avec d'importantes disparités régionales et saison.
Figure 15 - Facteurs climatiques de la sécheresse, effets sur la disponibilité de l'eau et impacts (FR.8.6)
Les signes plus et moins indiquent la direction du changement que les facteurs ont sur d’autres, tels que le manteau neigeux, l'évapotranspiration, l'humidité du sol et le stockage de l'eau. Les trois principaux types de sécheresse sont énumérés, ainsi que certains impacts environnementaux et socio-économiques possibles de la sécheresse (en bas).
Dès le milieu du 20ème siècle, le changement climatique d’origine anthropique a entraîné des modifications détectables du cycle de l’eau :
Les changements d’usage des sols et l’utilisation d’eau pour l’irrigation ont influencé le cycle de l’eau plutôt au niveau local et régional. Par exemple, la déforestation à grande échelle a probablement fait diminuer l’évapotranspiration et les précipitations et augmenter le ruissellement dans les zones déforestées.
La variabilité et les extrêmes du cycle de l'eau devraient augmenter plus rapidement que les changements moyens, dans la plupart des régions du monde et ce dans tous les scénarios d'émissions.
Les précipitations annuelles à l’échelle globale devraient augmenter en moyenne de 2,4% dans le scénario de faibles émissions (SSP1-1.9) et de 8,3% dans le scénario à hautes émissions (SSP5-8.5) d’ici 2081–2100, par rapport à 1995–2014. Les précipitations extrêmes augmenteront dans presque toutes les régions, même là où les précipitations moyennes saisonnières devraient diminuer.
Figure 16 - Projection des changements relatifs à long terme des statistiques sur les précipitations quotidiennes (FR.8.15)
L’évaporation (océans) et l’évapotranspiration (terres) vont augmenter, avec quelques exceptions dans certaines régions qui deviennent de plus en plus sèches (et où l’évapotranspiration ne pourra plus augmenter !). Cette augmentation devrait provoquer une baisse de l’humidité du sol dans des régions déjà sèches, comme la Méditerranée et l’Afrique du Sud. De plus en plus de terres seront soumises à des sécheresses, elles-mêmes de plus en plus fréquentes et sévères.
En Méditerranée, dans le sud-ouest de l’Amérique du Sud, et dans l’ouest de l’Amérique du Nord, la vitesse d’aridification dépassera de beaucoup ce que nous avons connu lors du dernier millier d’années. Certaines régions tropicales deviendront également plus arides (bassin de l’Amazone, Amérique du Sud).
Figure 17 - Représentation géographique des régions où les sécheresses augmenteront du fait du changement climatique (FAQ.8.3)
Enfin, les glaciers de montagne diminueront dans toutes les régions, et la durée où une couverture neigeuse est présente diminuera également dans la plupart des cas. La fonte des neiges au printemps débutera plus précocement.
Température océan :
Stratification des océans :
Circulation océanique :
Banquise : plus de glace - lors du minimum saisonnier - dans tous les scénarios.
Pour le mois de septembre, il est ensuite aussi probable qu’ils soient “quasiment sans glace” en arctique en 2080-2100 (trois derniers scénarios).
Figure 18 - Projection des changements relatifs à long terme des statistiques sur les précipitations quotidiennes (SPM.8.b)
Calottes glaciaires (Antarctique et Groenlande) :
Autrement dit : nous pouvons réduire les dégâts (plutôt que de continuer à les empirer), mais il n’y a pas de retour en arrière possible pour les calottes glaciaires, l’élévation du niveau des mers et de la température de l’océan. La machine (thermique en l'occurrence) est lancée.
Glaciers (couche de glace terre ferme) :
Figure 19 - Évolution de la masse des glaciers, à horizon 2100 et selon les régions du monde (FR.9.21)
Pergélisol (permafrost en anglais) : -25% (de volume) par degré supplémentaire.
Couverture neigeuse : -8% dans l’hémisphère nord par degré supplémentaire.
Niveau des mers, due essentiellement à la dilatation (38%) et la perte de masse glacier et calottes glaciaires (41%) :
Figure 20 - Évolution du niveau de la mer, selon les scénarios et à horizon 2150 (FR.9.27)
Des modèles sont définis selon des types de régions (par exemple : bassins méditerranéen, lacs, vallées, etc). L’objectif est de faire apparaître les spécificités géographiques (végétation, reliefs, urbanisation,etc). Cela permet alors d’avoir un modèle plus adapté à la réalité (au lieu de modéliser d’un bloc l’ensemble de la Terre).
Malgré tout, il y a certaines limites. Typiquement, la variabilité du système climatique (de par les sources internes, par exemple les oscillations de température de l’océan Pacifique, ou externes, telles que le cycle solaire).
Conclusions du modèle :
Les émissions de GES d’origine humaine ont entraîné une augmentation de la fréquence et/ou de l’intensité de certains phénomènes météorologiques/climatiques extrêmes depuis l’ère préindustrielle.
Certains événements récents auraient été très improbables sans présence anthropique (méga-feux, inondations, …etc). On bénéficie d’ailleurs désormais d’une meilleure compréhension physique des processus, plus grande littérature scientifique et meilleure accessibilité à différents types de modèles climatiques.
Figure 21 - Températures extrêmes recensées, avec à chaque fois le degré de confiance en la mesure et l’attribution à la responsabilité humaine (FR.11.4)
La fréquence et l'intensité des maximums de chaleur ont augmenté et celles des extrêmes froids ont diminué à l'échelle mondiale depuis 1950 (surtout à cause du forçage radiatif).
Les effets des GES varient en fonction des régions. Cela dépend de : l'humidité des sols, l’albédo (capacité des surfaces à réfléchir l’énergie lumineuse), changement d’utilisation des sols, concentrations d’aérosols, etc.
Les extrêmes de chaleur devraient doubler en intensité par rapport à aujourd’hui dans le cas d’un réchauffement de 2°C, et quadrupler si ce dernier atteint 3°C.
Les fortes précipitations ont probablement augmenté sur trois continents : Amérique du Nord, Europe et Asie. La fréquence et l’intensité vont augmenter (7% de plus par 1°C de réchauffement supplémentaire). Cela entraîne une augmentation (fréquence et ampleur) des inondations pluviales.
Ces évolutions dépendent des différentes régions, certaines subiront plus d’inondations là où d’autres souffriront d’une baisse.
Nous avons déjà fait face à une augmentation de la fréquence et gravité des sécheresses, augmentation des cyclones tropicaux puissants et davantage d’événements composés (secs/chauds, incendies, inondations, etc), et à l’avenir avec un climat qui se réchauffe cela va encore s’intensifier.
Pour tout résumer, ou presque :
Figure 22 - Synthèse de l’évolution des différents types de cyclones, selon les régions du monde (FR.11.20)
Utilisation de l’indicateur CID (Climatic Impact-Driver) : conditions climatiques d’une zone donnée dont les phénomènes affectent directement les sociétés et écosystèmes. Les CID peuvent quantifier les changements passés et estimer les futurs.
Ces indicateurs montrent que :
Concernant les impacts :
Figure 23 - Réponse des cultures aux seuils de température maximale (FAQ.1)
Le taux de croissance des cultures répond à l'augmentation quotidienne de la température maximale, ce qui entraîne une réduction de la croissance et une perte de récolte lorsque les températures dépassent les seuils de température critique et limite, respectivement.
Notez que les changements dans d'autres facteurs environnementaux (tels que le dioxyde de carbone et l'eau) peuvent augmenter la tolérance des plantes à l'augmentation des températures.
Les données sur les seuils / limites des différentes sociétés et écosystèmes sont de plus en plus essentielles (par région) afin d’être utilisées à différents niveaux : politiques publiques, entreprises, mais aussi assurances, etc.
Le rapport est complété d’un atlas interactif accessible gratuitement en ligne qui permet de visualiser les impacts des différentes évolutions du climat.
Les SSP (Shared Socio-economic Paths) sont des scénarios de développement des sociétés humaines dans le futur.
Ils sont le pendant sociologique et économique des RCP (Representative Concentration Pathway - scénarios de forçage radiatif présentés dans le rapport précédent).
Ils sont répartis en 5 familles :
Figure 4 (vue en introduction) - Évolution des émissions de CO2 et autres GES selon les scénarios (a), avec leur contribution respective au réchauffement global (b) (SPM.4.a-b)
Décryptage du nom des scénarios (exemple : SSP3-7.0) : le premier chiffre correspond aux hypothèses socio-économiques (3) et le second à l’évolution positive de forçage radiatif (+7.0 W.m-2).
Sujet peu évident et souvent mal compris, pour lequel nous vous conseillons la vidéo du Réveilleur (Que se passerait-il si on arrêtait nos émissions de CO2 ?). Ici, nous tâchons de vous synthétiser les points qui nous semblent clés.
Premièrement, si les émissions stagnent, alors la concentration continue de monter et la température augmente de façon quasi-proportionnelle.
Figure 24 - Évolution du réchauffement si stagnation des émissions annuelles (Le Réveilleur - Que se passerait-il si on arrêtait nos émissions de CO2 ?)
Ensuite, si la concentration stagne, alors la température augmente peu avant de se stabiliser (du fait du temps de passage du CO2 dans l’atmosphère, de l’ordre de la centaine d'années). À concentration constante, il y a une inertie, le temps d’atteindre l’équilibre thermique.
Figure 25 - Évolution du réchauffement si concentration constante de CO2 (Le Réveilleur - Que se passerait-il si on arrêtait nos émissions de CO2 ?)
Par contre, si les émissions deviennent nulles (i.e. neutralité carbone), alors la concentration atmosphérique en CO2 se met à baisser. D'abord relativement rapidement, puis de plus en plus lentement jusqu'à mettre plusieurs dizaines de milliers d'années pour revenir au précédent équilibre.
L’effet “refroidissant” de cette baisse de concentration vient alors contrer l’augmentation de température liée à l’inertie thermique. À émissions nulles (du jour au lendemain, donc cas théorique), on observerait donc dans un premier temps une stagnation de la température (avant que cela diminue ensuite).
Figure 26 - Évolution du réchauffement si émissions nulles de CO2 (et stagnation de la concentration du reste) à partir de 2020 (Le Réveilleur - Que se passerait-il si on arrêtait nos émissions de CO2 ?)
Par contre, si on arrête aussi les aérosols (qui ont un impact négatif sur le forçage radiatif), alors la température augmente rapidement, car ils ont une courte durée de vie et ne sont donc vite plus là pour refroidir l’atmosphère.
Figure 27 - Évolution du réchauffement si émissions nulles de CO2 et d’aérosols (Le Réveilleur - Que se passerait-il si on arrêtait nos émissions de CO2 ?)
Enfin, si l’on intègre également le méthane (GES important, d’une durée de seulement une douzaine d’années), alors la conclusion d’un arrêt immédiat de toutes émissions (à nouveau, c’est un exercice de pensée pour comprendre les mécaniques), alors la température baisserait assez rapidement.
Figure 28 - Évolution du réchauffement si émissions nulles pour l’ensemble des GES (CO2, aérosols et méthane) (Le Réveilleur - Que se passerait-il si on arrêtait nos émissions de CO2 ?)
En pratique cependant, l'écart d'émissions entre différents scénarios n'étant pas radical à court terme, cela met plusieurs dizaines d'années à se voir sur la comparaison des concentrations en CO2 et donc du réchauffement moyen.
Finalement, il y a aussi l'inertie sociétale, qui vient de notre dépendance à la consommation de ressources fossiles.
Aussi, comme nous avons pu le voir dans différents chapitres, les inerties peuvent être bien plus longues pour d'autres phénomènes physiques (plusieurs centaines d'années pour les calottes glaciaires à milliers d'années pour l'élévation du niveau des mers).
Nous impactons donc actuellement le climat et l’environnement pour des échelles de temps supérieures à des dizaines voire centaines de générations. Néanmoins, notre avenir est donc entre nos mains.
Nos actions auront des conséquences dès le court terme (dans un sens comme dans l’autre), même s’il ne sera pas évident d’observer rapidement les bénéfices/préjudices par rapport à un autre scénario.
Il n’est plus possible aujourd’hui de douter de l’influence humaine sur le réchauffement climatique, dont une grande part est attribuable à la combustion d’énergies fossiles. Les changements déjà observables de l’atmosphère, des océans, de la cryosphère et de la biosphère sont d’une ampleur absolument sans précédent depuis des millénaires, surtout au regard de la rapidité à laquelle ils surviennent.
Le réchauffement climatique a déjà et va avoir des effets sur tous les écosystèmes, en faisant varier les moyennes globales (comme la température moyenne à la surface de la Terre) mais aussi et surtout en augmentant la fréquence et l’intensité des phénomènes extrêmes (inondations comme sécheresse par exemple).
Les engagements et actes des différents pays sont aujourd’hui insuffisants pour parvenir à limiter l’augmentation de la température moyenne mondiale en dessous de 2°C, et encore moins en dessous de +1,5°C (qu’on dépassera probablement en 2030). Cependant, il est important de noter que “chaque dixième de degré compte” (pour citer Valérie Masson-Delmotte, co-présidente du groupe 1 du GIEC) et qu’il faut dès à présent tout mettre en œuvre pour se trouver dans le scénario le plus optimiste possible.
Pour un Réveil Écologique
Un article écrit par Lou Valide & Loïc Bonifacio, avec l’aide de Sébastien Pezza, Rémi Vanel & Cyprien Brabant
Sources : GIEC (décryptages sous forme de threads Twitter, réalisés par Pour un Réveil Écologique en Août 2021), Le Réveilleur, Chez Anatole, Bon Pote, The Shift Project - Carbone 4 & OMNEGY