Le secteur de l’énergie a un caractère hautement stratégique pour la transition socio-écologique. Il est à la fois la racine du problème, avec un modèle dépendant fortement des énergies fossiles et des acteurs qui cultivent cette dépendance depuis des décennies, mais aussi une clé de la solution par son aspect structurel.
Malgré la centralité de cet enjeu, les entreprises du secteur de l’énergie ne montrent aujourd’hui qu’un engagement partiel en faveur de cette transition. La plupart de celles que nous avons rencontrées continuent en effet de prendre des décisions qui, certes diversifient leur mix énergétique mais préservent un modèle basé sur l’exploitation d’énergies fossiles dont la production continue d’augmenter. La plupart des infrastructures construites aujourd’hui nous enferment donc durablement dans un modèle dépendant des énergies fossiles.
La transformation à effectuer est de taille : il s’agit de sortir de la dépendance aux énergies fossiles, tout en intégrant le caractère fini des matériaux et ressources énergétiques qui s’y substituerait. Par ailleurs, aux enjeux environnementaux liés à l’énergie s’ajoutent invariablement des enjeux sociaux, tels que l’accès à une énergie “propre” en quantité suffisante, qui doivent être pris en compte dans la transition du secteur.
Parmi les entreprises rencontrées, toutes ont fixé des objectifs de réduction des émissions de CO2eq, mais témoignent encore d’une très faible, voire inexistante prise en compte des enjeux de pollution ou de protection de la biodiversité. Plus généralement, les objectifs fixés et les actions mises en place se limitent à la conformité aux réglementations en vigueur et ne présagent pas d’une transformation du système énergétique, qui permettraient de respecter l’Accord de Paris. Nous notons cependant une exception sur la prise en compte des enjeux liés aux ressources minérales, dont l’importance stratégique incite fortement les acteurs à se mobiliser.
Évidemment, il ne s’agit pas ici de décrier un système qui évolue, malgré la peine. Les énergies renouvelables se développent, les voitures s’électrifient et le parc immobilier est en cours de rénovation. En revanche, il est essentiel de souligner que ces évolutions sont cantonnées à des géographies spécifiques, c'est-à-dire principalement au sein des pays occidentaux. Or, la plupart des entreprises rencontrées et analysées pour ce rapport sont par ailleurs des multinationales qui ont donc une responsabilité pour accompagner la transition sur de nombreux territoires.
Le chemin à parcourir est encore long et les stratégies et leurs mises en place des entreprises restent décevantes. Nous ne pouvons nous empêcher de restituer cette observation dans la continuité d’un historique de fabrique du doute qui a longtemps régné au cœur des stratégies des entreprises pétrolières et gazières, pour se mobiliser contre la réglementation environnementale. La volonté de ce rapport a donc été de balayer les grands enjeux du secteur et d’apporter un regard critique sur la réponse des entreprises, afin de donner des clés de compréhension aux personnes souhaitant travailler dans ce secteur. Nous nous adressons en particulier aux étudiant·es et jeunes diplômé·es qui vont rentrer leur vie professionnelle et qui souhaitent donner un sens à leur métier, dans le cadre de la transition sociale et écologique. En effet, la transformation de notre modèle ne se fera pas sans des esprits éclairés et conscients des enjeux.
Pour un réveil écologique, mars 2024